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ACMy Marc Morand, 2020/2, C 1.7 Discours de Marc Morand, président de Martigny-Ville, à l’occasion de la Fête nationale suisse ou Fête du premier août. \ \ Suivent : \ *02.08.1948. Correspondance de Maurice Rouiller, instituteur, adressée à Marc Morand, président de Martigny-Ville, le félicitant
Contexte de plan d'archivage |
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Niveau: | Document |
Zone d'identification |
Cote: | ACMy Marc Morand, 2020/2, C 1.7 |
Titre: | Discours de Marc Morand, président de Martigny-Ville, à l’occasion de la Fête nationale suisse ou Fête du premier août.
Suivent : *02.08.1948. Correspondance de Maurice Rouiller, instituteur, adressée à Marc Morand, président de Martigny-Ville, le félicitant pour son allocution du premier août. **s.d. Pensées de Maurice Maeterlinck, sans date ni signature. |
Dates |
Période de création: | 01/08/1948 |
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Support |
Support / Träger: | Papier, 3 pièces, dont 1 exemplaire dactylographié avec corrections manuscrites (discours a), 1 corresondance (b) et un s.d. (c). |
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Zone du contenu et de la structure |
Contenu: | 01.08.1948. Savoir : « Mes chers concitoyens, en cette soirée où notre peuple tout entier communie avec ferveur dans l’amour de la patrie que les trois cantons primitifs fondèrent par le pacte fédéral du 1er août 1291 [01.08.1291] et, en cette année où la Suisse célèbre le centenaire de la Constitution fédérale de 1848, il nous paraît opportun de rappeler à grands traits les origines de la Confédération suisse et les phases successives du développement de nos institutions à travers les siècles. La pacte initial de 1291, conclu peu après la mort de Rodolphe de Habsbourg, fut avant tout un acte de [tracé : définitif] défensif et une mesure de précaution prise par les trois Waldstaetten, afin de préserver et de défendre en commun, au besoin par la force, leur liberté et leurs droits contre tout ennemi, qu’il vienne de l’extérieur ou qu’il soit de l’intérieur. Menacés par l’énorme accroissement de la puissance des Habsbourgs, les Waldstaetten refusaient, par ce pacte, de payer des impôts nouveaux à cette Maison, de reconnaître des juges non désignés par eux, et proclamaient leur volonté de demeurer des hommes libres. A Morgarten, la jeune ligue reçut le baptême du feu. Cette victoire amena les Suisses à sceller une seconde alliance le 13 décembre 1315 [13.12.1315], connue sous le nom de pacte de Brunnen. Ce pacte va plus loin que celui de 1291. Il affirme la souveraineté absolue des montagnards libres sur leur propre territoire et, à l’encontre du précédent, contient une idée d’expansion et de conquête. Dès 1332, Lucerne s’allie aux trois cantons primitifs, bientôt suivie de Zürich, Glaris, Zoug et Berne.
La Confédération des huit cantons devint rapidement une véritable puissance avec laquelle il fallait compter. Sans doute allait-elle avoir encore de durs combats à soutenir et des conflits internes à résoudre, mais son autorité croissait sans cesse. Les victoires sur Charles le Téméraire donnèrent aux Confédérés un grand prestige à l’étranger. Malheureusement, les compétitions pour le butin de Bourgogne et l’entrée des villes de Fribourg et de Soleure dans la Confédération créèrent une tension redoutable, et il fallut toute la sagesse et l’autorité d’un Nicolas de Flüe pour rétablir la concorde. L’accord de Stans, en 1481, est le premier acte qui émane de la Confédération comme telle et où des décisions sont prises par l’ensemble. Mais c’est à l’époque des guerres du Milanais que la puissance de la Confédération atteignit son apogée. Conduits par le Valaisan Mathieu Schiner, les Suisses déferlent dans les riches plaines de la Lombardie et font la conquête de Milan en 1512. La gloire sur les champs de bataille confère à la Suisse un lustre incomparable dans toute l’Europe. Puis vint la retraite de Marignan qui mit un terme à cette politique et à ces guerres incessantes pour des princes étrangers. |
| La Confédération commença à se replier sur elle-même. On ne voulut plus à l’avenir prendre parti ni pour l’Empire, ni pour la France, mais vivre tout simplement en Confédérés. Désormais la Suisse renoncera à jouer un rôle actif dans les grands conflits européens. Les guerres de religion qui suivirent la réforme risquèrent un moment de rompre l’alliance entre Confédérés, ce qui eut signifié l’effondrement de notre patrie ; cependant, la force de l’ancienne alliance finit par triompher et grâce à elle l’esprit de solidarité demeura vivant dans les cœurs. La politique de neutralité adoptée dès le début du XVIe siècle fut maintenue et respectée jusqu’à nos jours. Sauf pendant la courte période de la Révolution française et des guerres du Premier empire. Jusqu’à l’année 1798, la Suisse fut une Confédération des Etats. La souveraineté étant l’apanage des treize anciens cantons et des pays alliés, la Diète ne jouait qu’un rôle secondaire.
Mais, subissant les contre-coups de la Révolution française, la Suisse devint en 1798 la République helvétique, une et indivisible. Sa constitution unitaire, d’origine étrangère, remplaçait le mot de Suisse par celui d’Helvétie et le mot de Confédération par celui de République. Elle ne pouvait pas convenir aux traditions profondes de notre [tracé : pays] peuple. Aussi, cinq ans plus tard, Bonaparte, premier Consul, gratifia-t-il la Suisse d’une nouvelle constitution connue sous le nom d’acte de médiation [19.02.1803]. Malgré son origine étrangère, l’acte de médiation fut bien accueilli ; c’était une heureuse transaction entre les idées de l’ancien régime et celles de la Révolution, qui ne donnait victoire à aucun des partis en présence. La Confédération reprenait son nom de Suisse et se composait de dix-neuf Etats. Notre pays se remit des violentes secousses qu’il avait subies : ce fut pour lui un temps de repos et de progrès que les cantons mirent à profit pour s’organiser. Mais sa neutralité ne fut plus que théorique ; elle dépendait du bon plaisir de la France ; politiquement, la Suisse ne s’appartenait plus. |
| L’acte de médiation fut abrogé le 22 décembre 1813 [22.12.1813], et une nouvelle constitution fut adoptée par dix-sept cantons. Peu après, elle était remplacée par le pacte de 1815, charte des plus rudimentaires. C’était moins une constitution qu’un traité d’alliance conclu entre les Etats souverains en vue de leur commune sécurité. On n’y trouvait plus trace des garanties individuelles consacrées par la Constitution helvétique et l’acte de médiation. Ce pacte avait été précédé de la reconnaissance de la neutralité de la Confédération par le Congrès de Vienne qui garantissait de plus l’intégrité du territoire suisse, avec ses vingt-deux cantons. L’éveil de l’esprit public et de l’esprit national, les tendances nouvelles en faveur des libertés individuelles provoquèrent bientôt dans plusieurs cantons des mouvements pour la révision du pacte réactionnaire de 1815. L’idée de développer les prérogatives du pouvoir fédéral préoccupait les esprits soucieux de l’avenir et un projet de révision fut élaboré par la Diète en 1932. Ce projet s’étant heurté à l’opposition de dix cantons, échoua. Ce n’est qu’après plusieurs années de troubles intérieurs, de luttes confessionnelles marquées par la guerre civile dans plusieurs cantons et par les événements du Sonderbund, que la Diète fédérale put reprendre l’œuvre de la révision du pacte de 1815 et doter enfin la Suisse d’une constitution qui faisait d’elle un Etat fédératif, seule solution au problème de son existence.
J’ai nommé la Constitution fédérale de 1848, dont nous célébrons cette année le centenaire et à laquelle, sans distinction de partis, nos plus hauts magistrats, avec à leur tête M. Celio, président de la Confédération, viennent de rendre un hommage solennel et mérité. Cette constitution, œuvre hardie et novatrice, est un véritable chef-d’œuvre de sagesse politique qui a su réaliser l’unité morale et politique de la Suisse dans la diversité des institutions et assurer le développement de la prospérité nationale. Elle a véritablement créé la Suisse moderne, resserré le lien fédéral et donné à notre pays une organisation qui répond à la nature, aux traditions et aux besoins du peuple suisse et des cantons. Des vingt-cinq républiques juxtaposées poursuivant jusqu’alors isolément leurs destinées propres, unies seulement dans l’intérêt de la défense extérieure, ayant des souvenirs communs mais pas d’aspiration commune, la Constitution de 1848 réussit à faire un tout harmonieux. Monument de bon sens, elle constitue un heureux compromis entre les intérêts nationaux et les intérêts cantonaux, entre la centralisation et le fédéralisme. Grâce à cette charte, vieille de cent ans, qui forme toujours la base de nos institutions, malgré la révision de 1874, l’activité législative de la Confédération se déploya magnifiquement et se manifesta dans les domaines les plus divers pour le grand bien de notre peuple. |
| C’est ainsi qu’aux fêtes du centième anniversaire de l’Etat fédératif suisse, le 19 juin dernier [19.06.1948], à Berne, M. le président du Conseil national a pu dire en parlant de la Constitution fédérale de 1848 : « C’est avec ferveur que nous évoquons un des événements décisifs de notre histoire ; ce moment où, par une constitution nouvelle et novatrice, nos grands-pères ont décidé de donner à la patrie des cantons souverains et si souvent divisés le caractère d’une véritable nation ; cette formation d’un Etat fédératif où, du sol riche et fertile de nos diversités de langues, de confessions et de coutumes, la volonté d’une communauté solidaire peut enfin jaillir pour affronter les dangers communs, résoudre les tâches économiques et sociales, affirmer l’unité de l’âme de la patrie et la foi commune dans ses destinées ». A notre tour, ce soir, mes chers concitoyens, après avoir évoqué les chartes fondamentales qui depuis 1291 ont régi la Confédération suisse, de nous incliner avec reconnaissance devant ceux qui ont su doter notre pays de la Constitution de 1848 à un moment crucial pour les destinées de la Suisse. Honneur à ces citoyens : ils ont bien mérité de la patrie.
Et maintenant, Mesdames et Messieurs, forts d’une expérience centenaire, nous saurons, tout en conservant à notre Suisse un caractère d’Etat fédératif, maintenir et fortifier encore notre volonté d’union, de cette union dans la diversité, qui a fait de notre pays une des nations les mieux organisées du monde et qui, ajoutée à notre résolution inébranlable de défendre notre sol, a certainement été un des facteurs les plus importants nous ayant permis d’échapper aux deux dernières guerres qui ont ensanglanté l’Europe. Cette union pour qu’elle soit pleinement féconde et agissante, nous ne la voulons pas seulement sur le plan national, mais aussi et surtout entre citoyens. Travaillons à intensifier les sentiments et les principes susceptibles de nous unir et à faire taire ceux qui peuvent nous diviser. Quelles que soient leurs opinions politiques, les hommes sincères veulent tous ce qu’ils considèrent être le bien du pays. Sachons place la patrie au-dessus des opinions politiques et les idéologies. Elevons nos cœurs en créant une vraie solidarité entre les différentes classes de notre population, dont la très grande majorité aspire à la concorde et à la paix sociale pour le plus grand bien de tous. Soyons bienveillants envers ceux qui ne partagent pas nos opinions ou notre conception de la vie. La Vraie démocratie proclamera toujours le droit aux libertés essentielles [tracé : liberté de l’individu, la liberté de pensée et de conscience], conditions du respect de la dignité humaine. Fermes, et s’il le faut intransigeants sur les principes, soyons tolérants envers les individus : la tolérance est la vertu des forts. C’est ainsi que, par l’application de notre belle devise, grandira en chacun de nous l’amour de notre chère patrie, en l’avenir de laquelle nous avons une entière confiance malgré la situation angoissante du monde. |
| En prononçant ce mot de « patrie » à l’occasion du double anniversaire que nous célébrons en ce moment, nous sentons tous, n’est-il pas vrai, vibrer notre cœur de la plus pure émotion. Car la patrie n’est pas constituée par un ensemble d’hommes vivant sous les mêmes lois, ni même par l’unité de race ou l’unité de langue, non, ce qui fait la patrie c’est une âme, une sensibilité, une intelligence et une volonté à la fois. La piété patriotique suppose le souvenir du passé dans ses gloires et dans ses détresses, la solidarité dans le présent et l’accord des volontés dans l’effort libre pour des destinées meilleures. Le patriotisme ne souffre pas qu’on ne l’attache qu’au moment présent, qu’à la génération vivante, comme s’il n’y avait plus de pères, et comme s’il ne devait plus y avoir d’enfants. La piété patriotique nous interdit de confondre la patrie avec un régime. Les régimes passent et la patrie demeure.
La patrie : c’est aussi le cadre merveilleux qui nous entoure, elle est dans les sombres monts comme sur les cimes toujours blanches de nos Alpes, dans les grandes plaines mamelonnées du plateau suisse, dans les sauvages vallées des Alpes, comme dans les vertes forêts du Jura ; elle est sur les bords enchanteurs de nos lacs et sur l’alpage solitaire. Nous la trouvons dans nos villages aux habitations rustiques et aux mœurs simples, comme aussi dans nos villes industrieuses et commerçantes. La patrie est enfin et surtout, la terre qui nous a vu naître, témoin de nos joies et de nos souffrances, la terre qui nous reprend et dans laquelle, morts, nous reposerons à côté de nos parents et de nos enfants, à l’ombre de notre vieille église, les vivants restant près des morts et les morts près de Dieu ». |
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Utilisation |
Fin du délai de protection: | 31/12/1948 |
Autorisation nécessaire: | Aucune |
Consultabilité physique: | Sans restriction |
Accessibilité: | Publique |
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